L’université doit aujourd’hui apprendre à se renouveler dans un
environnement concurrentiel de plus en plus incitatif au changement. Si les
méthodologies traditionnelles ont longtemps eu la faveur des projets
académiques, elles s’adaptent de moins en moins à l’incertitude générée
notamment par des phases de travail devenues trop cloisonnées. Fort de ce
constat, nous avons souhaité initier dès le début du projet CIEL, une autre
approche méthodologique, résolument ancrée au cœur de l’agilité, nous
permettant ainsi de modéliser différemment nos pratiques de collaboration et de
coordination. Nous avons souhaité privilégier une démarche empirique dans
l’élaboration même de notre cadrage théorique. En effet, afin de prendre en
compte la multiplicité des variables en cause dans les contextes
d’apprentissage et d’enseignement, nous nous sommes appuyés sur le
paradigme de recherche RDE (Recherche Design en Education). Initialement
présentée comme du « design experiment » (Brown, 1992), cette approche
vise à « transformer l’éducation en favorisant la pratique réflexive parmi les
apprenants, enseignants et chercheurs » (Class et Schneider, 2012). A la fois
recherche-action et recherche expérimentale, la RDE s’appuie sur une
épistémologie pragmatique. Elle présentait donc plusieurs intérêts pour notre
projet de recherche. Elle nous permet de traiter de la question théorique des
compétences informationnelles des étudiants en contexte naturel, d’impliquer
les apprenants dans la conception du modèle expérimental numérique
(artefact) de façon à ce qu’ils puissent influencer les différents cycles de son
élaboration, de proposer des solutions durables en élaborant des règles de
design transférables à de futures recherches.

Nos pratiques de collaboration et de coordination ont également évolué vers
de nouvelles modalités faisant de notre pluridisciplinarité un élément moteur
de notre travail de recherche. En effet, les membres de notre équipe ont une
expertise accrue aussi bien dans les sciences de l’éducation, que les sciences
de l’information, les sciences de la communication, ou encore les sciences
informatiques. Ce qui pourrait se révéler dans une méthode traditionnelle de
gestion de projet comme un frein majeur, tant les cadrages conceptuels et
méthodologiques, les terrains d’investigation peuvent parfois s’éloigner voire se
confronter, se manifeste ici au contraire dans le projet CIEL comme une
véritable dynamique fédératrice. Les connaissances et les expertises
deviennent complémentaires car elles poursuivent un objectif commun. Elles
génèrent un dialogue permanent qui enrichit les points de vue de chacun et
élargit les stratégies d’intervention. Ces interactions permettent également
d’identifier rapidement tout problème. Pleinement dédiée à la tâche, l’équipe en
devient ainsi interfonctionnelle. « Du fait de sa pluridisciplinarité, l’équipe
Scrum va regrouper un certain nombre d’individus très différents de par leurs
profils techniques. Ce qui importe le plus est que ces compétences soient
assez complètes pour une réalisation qualitative de l’itération » (El Haddad,
Oger, 2017 : p. 53).

Pour preuve, le projet CIEL a été conçu concomitamment
au projet pédagogique « Bibliothèques et médiation numérique au service de la
réussite étudiante » proposé par le Service de Coopération Documentaire
(SCOP) de l’Université de Bordeaux. L’objectif principal de cette étroite
collaboration vise à s’appuyer sur les différentes expertises produites entre le
projet scientifique et le projet pédagogique afin d’ancrer notre recherche dans
l’action et de mettre à profit les résultats obtenus pour contribuer à lutter contre
le décrochage universitaire en Aquitaine et renforcer la formation tout au long
de la vie par l’acquisition de nouvelles compétences. La pluridisciplinarité
devient ici le point de contact entre plusieurs institutions puisque le SCOP se
chargera d’assurer le développement de notre dispositif numérique, son déploiement, son adaptation et son évaluation au contexte des autres
établissements partenaires.

Sur le plan pratique, pour que l’ensemble des membres, géographiquement dispersé, puisse avoir accès aux différents documents relatifs au projet CIEL de manière transparente et immédiate,  il a donc été indispensable d’utiliser des solutions informatiques mimant ce procédé (« to do », « in progress », « done »), mais déployé sur un serveur web, donc accessible à tous, partout, et tout le temps. De plus, la particularité du projet CIEL est qu’il repose sur deux niveaux d’agilité :
• une macro-agilité correspondant au scrum du projet CIEL, avec une
vision de haut niveau : les objectifs sont repartis entre différentes souséquipes
au regard de la nature hétérogène du projet de recherche (tant
académique qu’empirique)
• une micro-agilité correspondant à un scrum par sous-équipes, et
répondant aux spécificités de chaque objectif (un attendu académique ne
se pensera pas comme un attendu logiciel par exemple).

Trois solutions informatiques ont été mises en oeuvre :
• l’utilisation d’un système de création de cartes heuristiques partagées
(https://www.mindomo.com/fr/) permet de réfléchir à des besoins précis,
et de détailler les tâches nécessaires à la réalisation de celui-ci
• le système Trello (https://trello.com/) permet quant à lui d’avoir une
vision globale du projet de recherche, avec ses membres, ses souséquipes,
ses objectifs, etc. (niveau macro)
• le système Framemo (https://framemo.org) permet enfin de penser les
objectifs de manière granulaire, avec une représentation reprenant celle
des post-its. (niveau micro)